vendredi 12 mars 2021

Dix, Marine Carteron

Titre : Dix
Auteur : Marine Carteron
Éditeur : éditions du Rouergue
Date de parution : 2019



 Ils sont dix. Sept adolescents et trois adultes, sélectionnés pour participer à un escape game littéraire et passer à la télévision en prime time. Direction : un manoir sur une île coupée du reste du monde. Un endroit si isolé que personne ne vous entendra crier, gémir ou appeler à l'aide. Et quand la mort décide de frapper les candidats un par un, une seule question : qui est le coupable ? Un seul but : survivre ! Après Les autodafeurs (prix Libr'à nous) et Génération K (élu meilleur roman ado par la rédaction de Lire), Marine Carteron adapte librement les Dix petits nègres d'Agatha Christie. Sanglant et haletant !

 


J’adore Agatha Christie tout autant que les Dix petits nègres (pardon : Ils étaient dix). En même temps, qui n’aime pas Agatha Christie et les Dix petits nègres ? Si vous en faites partie, je vous autorise à fermer cette page et à ronger votre frein en attendant ma prochaine chronique. Sinon, restez : Dix est vraiment une excellente réécriture. L’autrice a parfaitement su s’en inspirer sans faire un bête copier-coller.

Le premier chapitre ressemble au calme avant la tempête : Marine Carteron présente en effet l’ensemble des protagonistes du drame à venir, en nous proposant de suivre le point de vue de chacun. On comprend vite que tous ou presque ne sont pas nets et que la plupart d’entre eux (tous ?) ont de lourds secrets dont l’existence est à peine cachée. 

Puis nos (anti)héros débarquent sur l’île et là, c’est la fête ! Commençons par le commencement : le socle sur lequel s’appuie l’intrigue – cet Escape Game littéraire. En ce qui me concerne, je n’ai jamais vraiment eu l’impression que l’on se trouvait dans une émission de téléréalité même si l’autrice a fait tout ce qu’il était possible de faire pour que cette histoire semble crédible – au point d’ailleurs que les dix participants y croient dur comme fer, au moins au début, et ce, même s’ils ne comprennent quasiment rien à ce qu’ils doivent faire. On pourrait prendre comme ça comme un bémol mais non, ça ne m’a jamais vraiment dérangée.

En effet, on est vite occupé par bien autre chose… Oui, je parle de cet enchaînement de meurtres tous plus sordides les uns que les autres. Marine Carteron a su faire preuve d’inventivité, mais ce n’est absolument pas « pour le fun » : la mise en scène de chacune des morts est justifiée. Je ne peux pas vous en dire plus sous peine de gâcher la surprise, mais vous pouvez me croire, c’est très loin d’être une simple débauche d’hémoglobine et de bouillie de cervelle tout juste destinée à satisfaire notre goût pour le macabre. Rien n’est laissé au hasard, et les références aux mythes grecs et aux contes qui ont bercé notre enfance apportent un vrai plus.

Ce que j’avais cependant craint avant de commencer ce livre, c’est que tout s’enchaîne trop vite ou, au contraire, qu’il y ait des temps morts entre chaque exécution. Eh bien non : j’ai été agréablement surprise de voir que le rythme de l’intrigue était parfaitement juste. Oui, les morts ont tendance à se succéder assez vite, mais c’est justifié par plein de petites choses et on n’a pas du tout l’impression d’étouffer sous la pile de cadavres qui s’accumulent. Le fait qu’on suive plusieurs points de vue y est bien sûr pour quelque chose : ça permet de « rallonger la sauce », mais pas dans le sens négatif du terme : ça nous permet plutôt d’envisager certains événements sous différents angles, et de compléter notre vision de ce qui s’est passé à tel moment du jour ou de la nuit. Je ne sais pas si ce que j’écris est vraiment clair. Peu importe : retenez juste que le rythme est bon, que vous ne vous ennuierez pas mais que, pour autant, vous ne serez jamais noyé.e sous trop d’action.

À côté de ces morts, l’autrice prend aussi le temps de nous expliquer les raisons de la présence des dix coupables sur l’île. Les informations sont distillées au compte-goutte, nous laissant le temps de comprendre la place que chacun occupe dans un vaste puzzle que je ne peux pas trop spoiler. Et ce qu’il y a de terrible, c’est qu’on ne peut s’empêcher de trouver certaines de leurs morts justifiées. J’ai vaguement essayé de me convaincre que personne ne mériterait de connaître une fin pareille, mais quand même… Vu la gravité des crimes de certains et certaines d’entre eux, je ne sais pas s’ils auraient mérité une autre mort…

Et ça, ça m’amène à vous parler des personnages. Oui, ils sont assez caricaturaux, mais même eux s’en rendent compte dès le début, alors ça ne m’a vraiment pas dérangée. Il y en a que j’ai détestés d’emblée (coucou Charles et Carie), d’autres qui m’ont eu l’air assez sympathiques (coucou Tyron, même si tes blagues n’étaient pas toujours très ouf) ou relativement attachants dans le sens où ils avaient l’air assez inoffensif (c’est à toi que je pense, Deborah). Eh bien, vous ne pouvez pas savoir à quel point je regrette de ne pas tous les avoir détestés de suite. Parce qu’aucun ne mérite qu’on s’y attache. Vraiment aucun. Vous voilà prévenu.e.


Dix s’inspire donc librement des Dix petits nègres, en en reprenant les grandes lignes tout en s’en détachant suffisamment pour que l’on n’ait pas l’impression de lire le même bouquin. Je crois avoir tout apprécié dans ce livre : le rythme, parfaitement équilibré, l’intrigue, qui met au même plan les morts (dont les mises en scène sont justifiées, rappelons-le) et la raison de la présence de nos dix antihéros sur une île, ou encore les personnages (oui oui) qui sont assez fouillés. Dans ces conditions, vous comprendrez pourquoi je vous le recommande sans hésiter une seconde

 

2 commentaires:

  1. Ce livre tout comme cette chronique sont excellents, aucune hésitation à avoir !

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